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Islande (25 juin - 4 juillet)

 Descente de l’avion à Keflavik… Saisis par le froid… Il ne pleut pas… J’atteins le bas de la passerelle et juste comme je pose le pied sur le sol islandais, il pleut !... Tout est gris, aucune visibilité, un vent à décorner les hiboux…

On récupère une voiture et on roule vers Kidafell, à une trentaine de kilomètres au nord de Reykjavik… Quand on croise un camion, on secroirait dans le poste de pilotage du bateau, dans le film « le Crabe Tambour », avec des paquets d’eau qui s’écrasent sur les vitres… Impressionnant… Je ne vois donc rien de l’Islande, sinon des lupins en fleur dans les fossés, partout…

Lundi 25 juin

Ce matin, il pleut toujours, mais on voit le paysage… Diaphane et gris, incontestablement islandais… Un fjord devant la ferme où nous avons passé la nuit, des montagnes affaissées vers la mer et ménageant une étroite plaine parsemée de collines, de minuscules volcans… C’est vert, noir et gris… Le gris pour la mer et le ciel… Pas d’arbres… Malgré l’absence de lumière, je vois que c’est beau…

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Dans le potager qui jouxte la maison, les plantations se limitent à deux essences : pommes de terre et rhubarbe, c’est tout… Et ce sera comme ça partout… Je crois que c’est à peu près les seules choses qui parviennent à pousser en plein air sous ces latitudes… On va faire des hécatombes de confiture à la rhubarbe !...

Un peu au nord de Kidafell, il y a le lac Midafellsvatn et avant de partir pour le nord-est nous en faisons le tour, empruntant des pistes largement carrossables malgré les flaques innombrables laissées par la pluie… Partout des Bécassines des Marais et des Grives Mauvis

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Bécassine des Marais

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Grive Mauvis

Je vois également de très nombreux Chevaliers Gambettes, un Pluvier Doré et des Courlis Corlieu

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Chevalier Gambette

Sur le lac, des Cygnes Chanteurs et des Sternes Arctiques en chasse… Pas mal d’Huîtriers Pies… Un Labbe Parasite décolle de la route devant la voiture… Je suis bien dans le nord… Un petit groupe d’Eiders à Duvet dans la rivière qui relie le lac au fjord… Le décor est planté…

Nombreux troupeaux de chevaux aux robes infiniment variées… Petits et musclés… Quelques vaches et beaucoup de moutons…

Allez, direction plein nord, par un tunnel sous le fjord, puis la ville de Borgarnes… On quitte la côte et on suit le cours d’une rivière… Les paysages se déploient : collines vertes tout en longeur, prairies, montagnes partiellement enneigées au loin… Je scrute le cours d’eau en conduisant quand, sur la pointe d’un banc de graviers, je vois un oiseau posé… C’est un Arlequin Plongeur mâle… Je quitte la voiture et progresse vers lui… Inaccessible et peu photogénique, puisqu’il dort la tête sous l’aile… Il ne bouge pas et je suis garé n’importe comment… Je le photographie tel qu’il est… Premier contact pour moi avec cette espèce encore jamais vue et observable en Europe seulement en Islande… Je prends comme un bon présage cette découverte facile dès le premier jour... L'avenir me contredira !...

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Arlequin Plongeur

La route est longue, le voyage durera tout la journée, ou peut s’en faut… Les voies sont étroites, la vitesse limitée à 90 km/h… Mais chaque courbe révèle une perspective nouvelle, rude et exotique… La nature est impressionnante et harmonieuse… L’absence d’arbres laisse le regard embrasser tout ce qui est à sa portée… Je crois que l’épithète grandiose est de circonstance, nous sommes sous le charme…

Nous faisons un détour pour rejoindre la côte nord de l’île, jusqu’à Hvitserkur… C’est un rocher isolé sur une plage, en bas des falaises à l’entrée d’un fjord ensablé… Rien d’extraordinaire en soi, mais l’environnement est magnifique… Le soleil fait quelques apparitions entre les averses et révèle sur les plages, la mer, les montagnes et les prés des couleurs improbables…

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Près d’un cours d’eau, je repère une Barge à Queue Noire qui fait sa toilette… Pas mal en plumage nuptial, je ne connaissais que la version hivernale, plus terne…

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Barge à Queue Noire

Une troupe d’Oies Cendrées dans un pré…

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Oies Cendrées

L’après-midi avance sans qu’on ne s’aperçoive de rien, puisque le soleil ne monte ni ne descend pour ainsi dire jamais… On approche du but…

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Vers Varmahlid, j’observe un petit groupe d’Oies à Bec Court… Elles sont accompagnées de poussins d’âges variés…

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Oie à Bec Court

Quelques kilomètres avant notre destination, c’est le lac Ljosavatn, avec un Plongeon Imbrin en plumage nuptial qui se repose assez près de la rive…

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Plongeon Imbrin

Finalement, nous arrivons à Dadastadir où nous logerons pendant quatre nuit dans une ferme… Il faut pour l’atteindre monter une route, toute droite qui escalade une colline… Nous sommes seuls au milieu des prés… C’est envahi par les Bécassines des Marais et les Grives Mauvis… Il y a toujours dans le ciel au moins deux ou trois bécassines qui chantent… Et ça dure 24 heures sur 24, puisqu’il n’y a pas de nuit… C’est une sensation exotique !...

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Bécassine des Marais

Beaucoup de Pipits Farlouses… Aussi des Courlis Corlieu et des Pluviers Dorés, comme partout d’ailleurs… Les oiseaux sont peu farouches…

Mardi 26 juin

Tout est comme hier soir… Les bécassines et les grives chantent encore près de la maison, parfois même perchées sur les cheminées ou sur la barrière du jardin… Plus loin, courlis et pluviers se font entendre… Quelques Mouettes Rieuses survolent le coin, toujours isolées… Un Hibou des Marais s’enfuie à quelques mètres de moi alors que je sors de la maison, je pense qu’il était posé sur un poteau de clôture du jardinet !…

Petit déjeuner, avec confiture à la rhubarbe, bien sûr, et puis nous partons pour la rivière Laxa…  J’ai lu que c’est ici que je devais cartonner pour les arlequins plongeurs et les garrots d’Islande, les deux objectifs évidents pour tout ornithologue européen en visite sur ces terres… Le cours d’eau est large, souvent ramifié, avec des zones calmes et des rapides…

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Sur les berges, j’observe une Barge à Queue Noire, manifestement territoriale, de très nombreuses Bécassines des Marais, des Chevaliers Gambettes, des Pipits Farlouses, des Grives Mauvis omniprésentes, et sur une petite plage, une Bergeronnette Grise

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Barge à Queue Noire

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Pipit Farlouse

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Grive Mauvis

Sur la rivière, je dérange de nombreux canards qui se tiennent près des berges, toujours des femelles, bien souvent avec des petits : Fuligules Morillons (les plus nombreux), Canards Colverts et Canards Pilets

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Fuligule Morillon femelle

Je craignais légèrement, quant aux Arlequins Plongeurs, que les mâles ne fussent déjà partis vers les rivages maritimes, abandonnant sur place les femelles et la progéniture dont ils se sentent manifestement bien peu responsables… Eh bien, mes craintes étaient fondées… J’observe seulement des femelles, assez peu nombreuses, bien ternes, généralement en plein milieu du courant, mobiles et difficiles à photographier…

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Arlequin Plongeur femelle

Sous les rives, dans les cavités creusées par le cours d’eau, j’aperçois à plusieurs reprises des Phalaropes à Bec Etroit qui jouent à cache-cache… J’espère voir cette espèce plus tard dans de meilleures conditions, là c’est plutôt frustrant… Continuellement quelques Sternes Arctiques suivent le courant et plongent parfois vers la surface de l’eau…

Nous avons marché longuement le long de la rivière et maintenant, nous regagnons la voiture pour aller au lac Myvatn, tout proche… Et là, c’est le pur émerveillement… Le ciel est parsemé de petits nuages qui laissent filtrer le soleil jusqu’au sol, aménageant ainsi un mouchetis invraisemblable d’ombre et de lumière, complètement aléatoire, jouant sur les reliefs, les eaux et la végétation, eux-mêmes de couleurs différentes… L’enchantement !... Le lac est immense, contourné, parsemé de petits volcans verts, bruns, noirs, ocres ou rouges… On se croirait dans un film de fantasy, au pays des elfes et des sources enchantées (mais je crois qu’on y est un peu)… Nous sommes comme deux gosses et ne savons plus où en donner des yeux, d’autant que le vol des nuages change incessamment le tamis de lumière et révèle à chaque déplacement un pays nouveau… Une montagne était rouge, maintenant elle est brune… Le lac est bleu, puis gris, puis vert… Bien fait de choisir l’Islande !...

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Sur le lac, beaucoup de canards, en particulier des mâles qui paressent en grands groupes, pendant que les femelles élèvent seules les petits sur la rivière ou sur les rives : Fuligules Morillons, Canards Siffleurs, Canards Chipeaux

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Fuligule Morillon mâle

Des Cygnes Chanteurs aussi…

 

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Cygne Chanteur

Des Sternes Arctiques en chasse partout… Quelques Hareldes Boréales, plus ou moins isolées, se reposent sur de petites plages… Plumages incertains le plus souvent, comme l’individu de la photo suivante dont je ne sais discerner ni l'âge ni le sexe !…

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Harelde Boréale

Des Grèbes Esclavons, dans leur livrée nuptiale flamboyante, longent tranquillement les rives…

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Grèbe Esclavon

Et puis, partout, des Phalaropes à Bec Etroit… Sur le lac proprement dit, bien sûr, exploitant souvent de toutes petites criques où on les retrouve parfois par dizaines… Dans les prés alentours, parfois même sur les chemins… Je ne m’attendais pas à une pareille profusion… La distance d’approche est sans limite et la proximité absolue laisse mesurer à quel point ces oiseaux sont petits… On comprend comme ils peuvent être difficiles à détecter en pleine mer, le reste de l’année, hors période de reproduction et arborant un plumage bien plus terne !...

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Phalarope à Bec Etroit femelle

Il ne fait pas bien chaud, peut-être 10°C, alors nous allons boire un café dans un des quatre ou cinq bâtiments qui constituent Stukustadir, « l’agglomération » du lac… Sur le parking un Bruant des Neiges mâle cherche sa nourriture dans les pieds des passagers d’un bus qui vient de s’arrêter… Il se comporte comme un moineau, trop mobile pour une bonne photo…

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Bruant des Neiges

Retour au lac pour une marche tranquille, lente et incertaine… Nous contournons plusieurs criques creusées dans les rives, ainsi que des plans d’eau dépendants de l’ensemble mais séparés par des langues de terre… Un véritable entrelacs, aux formes capricieuses et au relief étrange… Des pitons rocheux se dressent ici ou là et des champs de lave figée viennent mourir au bord de l'eau, au milieu des herbes folles… Le soleil se met de la partie, même si le vent reste fort et glacial…

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Bécassines des Marais et Pipits Farlouses sont partout…

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Pipit Farlouse

Sur le lac des canards de différentes espèces et un Plongeon Imbrin

Et puis bingo !... Sur un des petits étangs je découvre un couple de Garrots d’Islande, seconde espèce emblématique du pays… La lumière a baissé, mais je dois quand même contourner les oiseaux pour mettre le soleil dans mon dos et ramper jusqu’à la rive pour me tenir au plus près… Ils sont encore assez loin… Ils nagent ensemble… Parfois, le mâle rejette la tête en arrière, jusqu’à toucher son dos avec l’arrière du crâne, dans une attitude exactement identique à celle que j’ai déjà observée chez les garrots à oeil d'or… Je prends mon temps, ne sachant pas encore que je vais croiser cette espèce assez régulièrement pendant le séjour…

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Garrot d'Islande mâle

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Garrot d'Islande femelle

Pour finir, nous allons à quelques kilomètres de notre logement, aux chutes de Godafoss... Ca vaut le détour...

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Dans les landes tourbeuses qui mènent au site, il y a de nombreux Pluviers Dorés et Courlis Cendrés, tous très territoriaux et peu farouches... J'en profite pour leur tirer le portrait...

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Pluvier Doré

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Courlis Corlieu

La journée s’achève (même si cette phrase, ici, ne veut pas dire grand-chose !) et nous allons manger un sandwich à la truite fumée dans le café déjà cité… Local et plutôt parfumé !...

Mercredi 27 juin

Ce matin, je jette un coup d’œil par la fenêtre et je découvre le Hibou des Marais posé sur le poteau d’où je le soupçonnais d’avoir décollé la veille… Photos à travers la vitre, tant bien que mal…

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Hibou des Marais

Autrement tout est pareil, mais le soleil est franc et la nature bien lumineuse… Bécassines des Marais et Grives Mauvis, Pipits Farlouses, Courlis Corlieu et Pluviers Dorés, pour l’ambiance sonore… Une Barge à Queue Noire aventurée dans une étendue herbeuse, tout près de la maison… On s’y habituerait presque !...

Nous passons sur la route au-dessus de la rivière Laxa qui coule assez bas dans une vallée… D’ici, j’aperçois au loin un couple d’Arlequins Plongeurs dans un méandre du cours d’eau… Un mâle, avec toutes ses couleurs !... Pas encore parti pour la mer !... A plus d’un kilomètre, je sais qu'une passerelle me permettra de traverser la rivière pour contourner les oiseaux et mettre le soleil dans mon dos… Pas de place pour se garer près du pont… Je dois donc faire au moins 2 kilomètres à pied, d’abord en remontant le courant le long de la route, puis en le descendant après avoir traversé, pour me placer là où je le souhaite… Quand j’arrive sur place, discrètement, et que je pointe le nez au-dessus du relief de la rive, je découvre deux couples de Garrots d’Islande, mais les arlequins ont filé, probablement en suivant le courant, ce qui semble être leur grande spécialité… Autant le dire et malgré des recherches quotidiennes, je ne verrai plus de mâle dans ce secteur…

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Garrots d'Islande

Nous allons partir vers le sud, dans l’intérieur des terres et rouler jusqu’aux abords du Herdubreuid, montagne de 1 600 mètres d’altitude environ… Juste pour avoir un aperçu du genre de paysages qu’on découvre en s’enfonçant dans le pays…Avant, un petit café, comme hier, à Stukustadir… Le Bruant des Neiges est toujours sur le parking, aussi remuant que la veille… Je me dis qu’il doit être ici en permanence et que je le photographierai plus tard dans de bonnes conditions… Eh bien je ne le reverrai plus !... Les raisins étaient trop verts…

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Nous passons d’abord à quelques kilomètres seulement à l’est du lac, par Hverarond, un site hydrothermal avec sources chaudes, fumerolles et marmites de boues… Un point où le déchaînement tellurique intérieur de la planète vient titiller la surface… C’est fascinant et ça dégage une forte odeur de blanc d’œuf dur, à cause du soufre… Il y a des solfatares, éminences rocheuses sculptées au fil du temps par les émanations d’une fumerolle… Tout autour le paysage est désolé, ocre, jaune, rouge et noir… On se croirait dans un film de science-fiction, sur une planète mortifère…

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Maintenant, nous roulons plein sud et le paysage devient très vite monotone… C’est un empire minéral, des champs de lave et des herbes rares… Quelques moutons… Plus de fermes, plus d’habitants… Dans le lointain s’élèvent des volcans isolés et des montanges enneigées… Et rien d’autre… Nous prenons violemment conscience du caractère absolument désertique de l’intérieur du pays… Seul le pourtour côtier est peuplé, avec une profondeur de pénétration variable selon les secteurs… La densité reste cependant toujours modeste, hormis à Reykjavik…

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Quelques réflexions en passant (si vous n’aimez pas la philosophie, sautez cet encadré !)…

En lisant des articles issus de différentes publications, j'ai découvert que l'Islande figurait, dans tous les classements mondiaux, comme l'un des trois pays les plus "paisibles" de la planète, le plus souvent d'ailleurs en première ou en seconde position... Et j'ai ressenti immédiatement les signes de cette caractéristique : sentiment de sécurité, calme, indépendance, simplicité et fluidité des rapports sociaux... J'ai poussé mes recherches et j’ai découvert que le pays n'avait pas d'armée, que la police était peu nombreuse (avec seulement une partie très faible de ses membres dotés d'une arme) et que le niveau de la criminalité était extrêmement bas... J'ai noté aussi l'un des taux les plus faibles de consommation d'alcool en Europe, ce qui a évidemment des répercussions très sensibles sur les comportements violents...

Je me suis demandé alors quelles pouvaient bien être les causes profondes de cette "paix"... J'en ai trouvé deux qui m'ont semblé pertinentes, mais uniquement si elles sont associées l’une à l’autre... Peut-être mon raisonnement est-il erroné, mais je jette quand même mes idées par écrit, d'une part pour ne pas les oublier et ensuite pour susciter chez mon étique et hypothétique lectorat d'éventuels commentaires, réponses ou réfutations... Si j'ai un tant soit peu raison, l'éclairage que renverrait cette "réussite" sur d'autres sociétés - et notamment la nôtre - s'avèrerait particulièrement désespérant.

1/ Une démographie équilibrée : Ici, les humains sont peu nombreux et vivent souvent loin les uns des autres, avec un potentiel d'intimité élevé... Le pays compte seulement un peu plus de 300 000 habitants... Reykjavik accueille à peu près la moitié de ceux-ci, mais dans un habitat relativement aéré et plutôt horizontal... Pas ou très peu de ces grands ensembles qui, du point de vue de Sirius, doivent ressembler à des clapiers insalubres et absurdes... Pour le dire de façon un peu triviale : on ne sent pas le souffle de son voisin dans la nuque... La circulation des êtres humains - et pas seulement en voiture - est fluide... La production de déchets et de déjections en tout genre est à l'aune du nombre d'habitants... Les êtres humains vivent dans un espace qui doit correspondre plus qu'ailleurs au milieu naturel (donc de confort) de l'espèce... On mesure en fait et sans conteste ici que la mère de toutes les batailles écologiques ne peut être in fine que démographique... Penser qu'une population dix fois plus nombreuse pourrait produire deux fois moins de déchets relève de la pensée magique, l'enseigner est un acte de foi... L’écologie politique qui n’évoque jamais le problème de l’augmentation vertigineuse de la population est, en terme de rigueur intellectuelle, aussi bancale que le christianisme, qui achoppe depuis toujours sur la justification de l’existence du mal… Bref, comme la plupart des animaux les humains ont besoin d'un lieu de vie qui corresponde à leur nature... Je crois que nous aimons croiser nos semblables, partager un temps leurs trajectoires et collaborer à des projets communs ; mais je sais qu'une trop grande promiscuité éveille forcément un stress surdimensionné, qui va lui-même déboucher soit sur la violence soit sur le délabrement physique ou psychique du sujet... Pour conclure ce premier point je dirai qu'une démographie adéquate est la condition nécessaire, mais non suffisante, au bien-être de notre espèce (et par là-même au plus large respect de son environnement)...

2/ Un individualisme bienveillant : Tout d'abord, je dois dire que je suis athée et, tout du moins intellectuellement, plutôt hostile aux religions... Je crois cependant que l'impact du protestantisme luthérien, religion largement majoritaire en Islande, n'est pas étranger à l'existence du second facteur favorable selon moi, à l'apparition d'une société plus "pacifique", je parle de l'individualisme utilitariste... Je crois que la société ou "communauté", en tant que superstructure visant à réguler les comportements et à faciliter la satisfaction des aspirations personnelles, intervient très peu dans ces civilisations en matière de morale et de vie privée, se cantonnant plutôt à l'instauration de règles utilitaristes aux ambitions pragmatiques... Pour le dire simplement : les gens ne semblent pas se préoccuper de ce que font ou pensent leurs voisins, dans la mesure où ceux-ci n'empiètent pas sur leur sphère privée... D'où la survenue d'une tolérance de principe... Les ressentiments, les frustrations et les jalousies ne sont pas imputés aux autres... On est loin des systèmes méditerranéens ou orientaux où la famille au sens large, le clan ou la tribu font peser sur l'individu un regard incessant prompt à condamner et à culpabiliser, déclenchant en retour une colère et une haine sourdes et rentrées dirigées contre l'autre dans un réflexe de vengeance... En substance et pour le dire de façon plus imagée : difficile d'imaginer ici l'installation de maffias claniques de type méditerranéen ou d'un maillage tribal basé sur un clientélisme totalitaire, comme on peut le voir dans les zones tribales du Pakistan par exemple... Je crois qu'un apprenti parrain qui viendrait promouvoir ici son système d'interdépendances vicieuses et fourbes se ferait tout simplement rire au nez par toute personne qu'il chercherait à recruter... La violence et la haine sont selon moi toujours fertilisées par les systèmes communautaristes, dont le spectre s'étend de la famille élargie jusqu’à la nation, en passant par le clan et la tribu... Que personne n'appartienne à personne et la société sera plus apaisée... Et je parle bien d'appartenance au sens d'appartenir à une communauté... Je crois tout simplement qu'il y a une erreur systémique dans la pensée dominante actuelle, politiquement correcte, qui professe que le communautarisme procède du racisme et de la haine de l'autre... C'est selon moi précisément le contraire : quand les hommes vivent repliés sur eux-mêmes, qu'au nom de prétendus principes « ancestraux » de respect et de solidarité ils tissent tout un réseau fétide de redevances et de dettes, qu'ils partagent des rites et des "traditions", alors ils commencent à exclure l'autre, l'étranger, le "différent" et à ne plus le considérer comme un être humain... D'où plus de haine et de violence...

Conclusion : Pour que la sauce prenne, l'espace et l'individualisme doivent aller de concert, l'un sans l'autre ne donne rien... Les hommes sont les mêmes partout et l'on pourrait penser qu'il suffirait d'appliquer les deux principes en question pour que la planète entière se "civilise"... Mais c'est compter sans les résistances que sont la démographie devenue folle et la vigueur, voire le retour en force, des traditions communautaristes... Pour pasticher Montesquieu, mais en vidant l'interrogation de toute l'ironie qu'il y mettait, je me demande "mais comment peut-on être Afghan ?"... Comment les hommes peuvent-il vivre en paix ici et se détester autant ailleurs... Il va sans dire que je ne prône aucune solution, toutes s'avèreraient probablement pire que le mal... Le progressisme a hélas montré ses limites et plus personne ne rêve de pacifier la planète... Seulement, entr'apercevoir un instant que la stupidité mortifère n’était peut-être pas une fatalité laisse forcément des regrets et un sentiment de rendez-vous manqué... Je crois au bout du compte que l'humanité est folle et qu'il faut vivre en hédoniste en acceptant son destin affligeant, en ayant bien conscience de l'inexistence de tout arrière-monde promis qui justifierait le gâchis ici-bas... 

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Le Herdubreid est une montagne étrange, un cône large et court, rocheux, coiffé par la neige d’un invraisemblable chapeau chinois tout blanc… Ce volcan semble avoir surgi de nulle part sur une planète ravagée…

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Après avoir nous être imprégnés de ces paysages, nous décidons de remonter près du lac pour une marche le long des rives… Nous choisissons un site très particulier du point de vue géologique… Près de Stukustadir, un anneau de terre, étroit, vient compléter une petite anse pour former une sorte de plan d’eau indépendant du lac… Cette ceinture est ponctuée de petits volcans qui viennent l’élargir de loin en loin… L’ensemble est assez sidérant et offre, d’un point de vue esthétique, une alternance de couleurs et de formes ahurissante… Sous nos pas, le sol tourbeux est un véritable régal de souplesse et de silence…

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Les oiseaux sont nombreux, tant côté terre que côté lac… Dans l’herbe ou en vol, des Bécassines des Marais, des Courlis Corlieu, des Pluviers Dorés, des Pipits Farlouses, des Phalaropes à Bec Etroit

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Phalarope à Bec Etroit mâle

Je vois également mon premier Bécasseau Variable du séjour, en plumage nuptial bien sûr, peu farouche bien que cherchant à se dissimuler dans l’herbe…

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Bécasseau Variable

Une femelle de Canard Siffleur conduit ses poussins dans les grandes herbes d’une pente, tout près de nous…

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Canards Siffleurs

Sur l’eau, comme presque partout, des canes avec leur progéniture, proches du rivage, et des mâles plus loin sur l’eau, généralement en groupes : Canards Colverts, Canards Chipeaux, Canards Siffleurs, Fuligules Morillons, Hareldes Boréales

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Canards Siffleurs

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Harelde Boréale femelle

Aussi des Cygnes Chanteurs… Nous admirons également plusieurs Grèbes Esclavons, plutôt confiants, qui se laissent dériver tranquillement, dans leur plumage flamboyant, tout près de la rive…

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Grèbe Esclavon

Le ballet des Sternes Arctiques est incessant…

Pour finir la journée, encore une petite marche le long de la rivière Laxa, mais en amont de l’unique pont qui l’enjambe, deux ou trois kilomètres à l’ouest du lac… Le courant est alternativement lent et rapide... Le paysage même dans un aussi petit périmètre change sans arrêt… La Bergeronnette Grise déjà vue hier sur sa plage est là, très territoriale et agressive… Au bout de quelques dizaines de mètres, je découvre un Plongeon Catmarin qui semble très à son affaire, en plein milieu du courant…

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Plongeon Catmarin

Toujours pas mal de Fuligules Morillons femelles avec leurs poussins qui les suivent dans les rapides, semblables à des fétus de paille… Je me demande comment ils peuvent échapper à la noyade, mais peut-être certains n’y échappent-ils pas…

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Fuligules Morillons

Je rencontre aussides femelles d’Arlequins Plongeurs, dont deux ensemble qui se reposent dans un bras tranquille du cours d’eau… Mais pas de mâles !...

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Arlequins Plongeurs femelles

Je croise également quelques Garrots d’Islande… Au retour, je suis « attaqué » successivement par un couple de Chevaliers Gambettes et par un Courlis Cendré dont j’ai dû pénétrer trop profondément les territoires… Les Chevaliers Gambettes sont une constante du voyage en termes de manifestations territoriales intempestives et d’irascibilité tapageuse, de plus ils sont très abondants…

Retour à Dadastadir, où je constate que le Hibou des Marais chasse au-dessus des prairies environnantes… Je peux affirmer que malgré l’absence de vraies journées, ses périodes d’activité intense se situent à ce qui devrait correspondre à l’aube et au crépuscule…

Jeudi 28 juin

Dernière jour avec le secteur de Myvatn comme base… Ce matin les Bécassines des Marais picorent la pelouse, juste sous nos fenêtres… Incroyable… Juste un peu trop à l’ombre…

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Bécassine des Marais

Le Hibou des Marais est déjà en chasse, survolant les herbages comme un fantôme, comme pourrait le faire un busard…

Nous partons explorer le nord-est de l’île et nous alternerons voiture et marche… D’abord, direction Husavik, où nous atteignons les rivages septentrionaux de l’Islande… Ce n’est pas très loin… En chemin nouveaux paysages et nouvel enthousiasme…

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Husavik est un tout petit port qui fait figure de grande ville dans la région… Il y a quelques bateaux de pêche dans les bassins, des maisons propres, colorées et simples... Le soleil est là pour le moment et de l’autre côté de la baie, des montagnes enneigées se reflètent dans la mer… Un petit café en terrasse, on a le temps…

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Et puis on repart, en faisant le tour d’une sorte de péninsule qui s’appelle peut-être Tornjeshreppur, mais je n’en suis pas sûr… La mer est toujours à notre gauche, avec ou sans falaise… On roule sur une sorte de plateaux parsemé de très rares fermes et recouvert d’herbre… Il y a les échassiers habituels auxquels s’ajoutent ici en nombre des Huïtriers Pies… Des Goélands Bruns, des Goélands Marins, quelques apparitions fugaces de Labbes Parasites dont on ne sait jamais ni d’où ils viennent ni ou ils vont… Des Sternes Arctiques, bien sûr, quelques Mouettes Rieuses… Les oiseaux les plus abondants sont les Fulmars Boréaux… Il y a des colonies sur chaque escarpement… Nous quittons un instant la voiture pour nous approcher du bord d’une falaise et regarder la mer en bas… Le temps est devenu blafard, tout change très vite en Islande… Au pied des rochers, sur l’eau, je distingue de nombreux Macareux Moines dont rien ne semble indiquer qu’ils nichent dans le secteur… Nous repartons…

Le long des plages et sur les rives des étangs côtiers les groupes d’Eiders à Duvet sont nombreux, constitués presque entièrement de femelles et de poussins… Les mâles sont cantonnés dans des endroits plus protégés et moins accessibles…

Nous quittons la mer pour repartir vers le sud en direction de Hljodaklettar, un canyon inscrit à notre répertoire du jour… Nous prenons une piste et roulons dans une végétation broussailleuse où les oiseaux semblent rares… J’ai cependant un bon coup d’œil en distinguant dans le fossé, bien avant d’arriver à sa hauteur, une femelle de Lagopède Alpin en plein bain de poussière (de terre devrais-je dire)… J’approche sans problème, séance photos…

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Lagopède Alpin femelle

Des moutons apparaissent ici et là, toujours des brebis avec leurs agneaux… J’ai l’impression que l’habitat inhibe chez cette espèce domestique l’instinct grégaire… Peut-être est-ce dû aussi à l’absence de prédateurs… Toujours est-il que jamais de ma vie je n’aurais vu autant de moutons sans qu’ils soient jamais en troupeau !...

Arrivée à Hljodaklettar… Nous laissons la voiture et partons à pied à travers de petits bois de bouleaux rabougris et torturés, où coulent des ruisseaux limpides… Et puis le choc… "A couper le souffle" comme on dit quand on ne trouve plus les mots !... Un canyon imposant et torturé, avec une rivière grise tout au fond… Des escarpements, des éboulis, des pitons détachés de l’ensemble, des formations aberrantes de rocs penchés sur le vide… Nous marchons longuement sur les hauteurs du site, dans un sens et puis dans l’autre… Seul le soleil manque à l’appel…18 06 28 hljodaklettar 12 site

Quelques kilomètres en voiture et nous sommes à Asbyrgi, un cirque de hautes falaises qui clôt un très long et large canyon… La région est couverte des petits bouleaux cités plus haut, c’est inhabituel pour moi… En chemin vers le fond du défilé, je note sur les falaises qui bordent le sentier très nombreux nids de Fulmars Boréaux… Je croyais ces oiseaux exclusivement côtiers et je découvre qu’avant tout, en période reproduction, ils sont rupestres… Je verrai des colonies tout au long du voyage, sur pratiquement toutes les falaises, à condition qu’elles ne soient pas éloignées de la mer de plus de quelques kilomètres…

Nous arrivons au cirque proprement dit après avoir traversé un couvert végétal inédit jusqu'alors... Nous entendons quelques phrases d’un Troglodyte Mignon, l’un des rares passereaux présents dans le pays… Nous découvrons tout au bout du chemin une immense falaise circulaire et grise, avec blotti à ses pieds un petit lac peu profond aux eaux transparentes sur un fond de roches jaunâtres... C’est joli, mais je ne conseillerais pas ce lieu comme destination principale d'une journée de découverte, c'est en fait assez banal… Il y a sur le minuscule lac une femelle de Garrot d’Islande qui élève ses tout petits poussins… Elle se prélasse sur les pierres ou nage curieusement en plongeant sa tête sous la surface, dans un style à la fois aérodynamique et ridicule… Elle est très confiante et je pense à Darwin qui, dans son « voyage d’un naturaliste autour du monde », l’aurait sûrement qualifiée de domestiquée... Question d'époque et de vocabulaire !...

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Garrot d'Islande femelle

Nous venons, très au large, de contourner le lac Myvatn par le nord, en tirant jusqu’à la côte... maintenant nous repartons vers le sud en le laissant à l’ouest… Le paysage se fait de plus en plus désolé et désertique… C’est minéral et inhospitalier, essentiellement des champs de cailloux étendus dans le lointain jusqu’à des montagnes pelées… Plutôt plat… Nous suivons une piste pendant plusieurs dizaines de kilomètres… Bien peu de vieici… Notre objectif est la chute de Detifoss… Nous y parvenons sans nous apercevoir de rien… Et pour cause, il s’agit d’un canyon monumental creusé par une rivière dans ce plateau monotone… A cause du relief, il ne se dévoile que lorsqu’on atteint son rebord... Mais là, que émerveillement !... C’est large, profond, sinueux et grandiose… Une ondulation de gorges vertigineuses, dans un environnement strictement minéral, avec une chute d’eau gigantesque au milieu… Les photos parlent mieux que moi…

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Une petite marche pour profiter de différentes perspectives et puis retour vers le lac Myvatn, que nous contemplons une dernière fois avec le départ prévu demain matin…

Vendredi 29 juin

Départ de Dadastadir, direction plein ouest, vers la ville de Grundarfjordur, sur la rive sud du Brediafjordur… Plus de 400 km en prévision, notamment par des pistes non  goudronnées… Ce matin, tout est plombé par un ciel gris et bas… Nous roulons dans des paysages nouveaux, avec malgré l’absence de lumière, l’offrande continuelle des montagnes, des rivières, des vallées et des cascades…

Les établissements humains sont résolument rares et de faible importance…

Nous repassons à Varmahlid, où nous retrouvons les Oies à Bec Court avec leurs petits…

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Oies à Bec Court

Nous atteignons ensuite la baie de Hunefloi que nous contournons pour traverser d’un trait, sous une pluie battante et par une piste incertaine, les terres désolées qui relient la péninsule du nord-ouest au reste de l’île… Peu d’oiseaux ou peu de visibilité pour les voir, c’est tout comme…

La lumière réapparaît quand nous atteignons la mer par le fond du Breidafjordur… Encore des montagnes et des couleurs infinies… Et puis l’océan en plus…

Les échassiers habituels sont là... Et puis, des bandes immenses d’Eiders à Duvet qui se reposent sur des plages toutes noires…

Nous pénétrons dans le Snaefellsness, la péninsule qui pointe entre Reykjavik et les fjords du nord-ouest… Nous roulons vers le soleil intermittent et atteignons Grundarfjordur, juste au bord de la mer, sur la côte nord…

Installation et un petit tour dans le secteur… Je cherche déjà les Arlequins Plongeurs, mais ne les trouvent pas… Nombreux Goélands Bourgmestres, avec des Goélands Marins et des Goélands Bruns… Partout des Fulmars Boréaux, sur la mer devant notre hébergement et nicheurs sur toutes les falaises (qui ne manquent pas)… J’observe deux Guillemots à Miroir dans la petite rade juste devant le parking, en déchargeant mes affaires… Mais comme pour l’essentiel de la journée, le temps est redevenu vraiment pourri, pour la première fois depuis le début du séjour… Pourquoi ne pas se reposer, on verra bien demain…

Samedi 30 juin

Je vais jeter un œil sur la petite rade, à quelques mètres de la voiture… Quelques Eiders à Duvet, nombreux Fulmars Boréaux et un Arlequin Plongeur mâle, en vol au ras de l’eau, qui me passe sous le nez comme pour me narguer… Je n’ai pas d’appareil-photos… Je ne sais pas d’où il vient… Il y a de nombreux Etourneaux Sansonnets autour du bâtiment… Sur les pelouses, Grands Gravelots et Bergeronnettes Grises

Froid et gris… Mais moins gris qu’hier… Pas terrible quand même, il pleut un peu… Nous partons pour Svortuloft, tout au bout de la péninsule du Snaefellsness… Une sorte de Finistère avec des falaises et une grande colonie d’oiseaux de mer…

Nous traversons, à la sortie du village de Rif (tiens, un  nom pas compliqué !) une immense colonie de Sternes Arctiques… Les oiseaux couvent dans l’herbe, de part et d’autre de la route… Ils sont plusieurs centaines…

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Sterne Arctique

Après avoir emprunté des pistes cahoteuses, nous atteignons la mer précisément à l'endroit où les rochers commencent à s’élever pour former quelques centaines de mètres plus loin des escarpements élevés et verticaux… Pour le moment, c’est une jolie plage, Skardsvik beach, parsemée de pierres et de rocs… C’est superbe et il ne manque que le soleil…

Nous atteignons les colonies d’oiseaux de Svoruloft… Site impressionnant… Et temps, hélas, de circonstance… La lumière est plombée et il pleut un peu… L’ensemble est inquiétant, un peu comme un dessin de Victor Hugo ou comme l’ouverture de « l’homme qui rit » du même auteur… Il ne manque qu’une femme en robe blanche, longs cheveux noirs dans le vent et qui viendrait insulter le ciel au bord de la falaise avant de se jeter dans le vide !...

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En fait d’apparitions romantiques, il y a surtout les oiseaux de mer, présents sur les falaises… Très nombreux Pingouins Torda, nombreux Guillemots de Troïl et Guillemots de Brünnich, cette dernière espèce occupant ici son point de reproduction le plus méridional…

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Guillemots de Troïl

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Pingouins Torda

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Guillemot de Brünnich

Les Macareux Moines sont bien moins abondants que les autres alcidés, ils sont posés sur des petites plateformes pierreuses, dans les parois verticales… Je ne sais pas pourquoi, je m’étais mis dans la tête qu’ici je les verrai sans difficulté, dans l’herbe au sommet des falaises… Eh bien c’est raté… Ou je ne les ai pas trouvés…

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Macareux Moines

Les Fulmars Boréaux sont bien présents – mais ils sont présents partout – tout comme les Mouettes Tridactyles qui constituent ici une colonie de dimension relativement modeste…

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Fulmar Boréal

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Mouette Tridactyle

Un phare orange domine l’ensemble, vous ne pourrez pas le louper…

Nous traversons ensuite vers le sud la pointe de la péninsule… C'est totalement désolé, quelques bosses rompent la monotonie d’une tourbière qui sétend à perte de vue, avec la masse imposante et enneigée du Snaeffelsjokull qui s’élève à 1 446 mètres et dont la dernière éruption remonte au bas-empire romain…

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Un Lagopède Alpin traverse la piste au vol alors que nous roulons au milieu de la végétation rase qui accueille bien sûr son cortège invariable de Bécassines des Marais, de Pluviers Dorés, de Courlis Corlieu et de Barges à Queue Noire

Toujours le même temps quand nous atteignons la petite plage de Djupallonssandur… La bruine, le ciel blafard et les rochers déchiquetés semés au hasard sur la plage de petits galets noirs évoquent encore en moi le romantisme du XIX° et les âmes torturées de ses hôtes… Le site est somme toute exceptionnel et mérite le détour… Juste devant la plage, un courant extrêmement dangereux est signalé à l’attention des éventuels baigneurs… Des baigneurs ?...

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On roule maintenant vers l’est, le long de la côte sud en direction d’Arnastapi, dans un paysage superbe où le soleil fait discrètement son apparition… Le Snaesffelsjokul sur notre gauche… A droite le minuscule hameau construit sur des pelouses qui viennent mourir au bord des falaises qui dominent la mer… Ca coup un peu le souffle !...

A l’entrée du village, dans l’herbe, une grande colonie de Sternes Arctiques, sur les falaises des Fulmars Boréaux, des Mouettes Tridactyles et quelques Cormorans Huppés… Sur les pelouses des Courlis Corlieu et des Chevaliers Gambettes très territoriaux, des Grives Mauvis… Les falaises sont superbes et nous marchons un bon moment tout du long… Je vois quelques Bécasseaux Violets sur un amas de rochers tout en bas, assez loin de la paroi… Nous décidons que nous reviendrons ici une autre fois dans les jours prochains si la lumière est meilleure… Nous en redemandons… Mais aujourd’hui le vent est glacial et le soleil bien timide…

Nous retournons vers la côte nord de la péninsule en contournant cette fois le Snaefellsjokul par l’est… La route s’élève et devient vite une piste… Nous franchissons le col et découvrons que le soleil brille sur toute la côte septentrionale… J’en profite pour faire plusieurs photos sous une lumière particulièrement à mon goût… Toutes viennent de la route qui conduit d’Olafsvik à Grundarfjordur…

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Nous nous reposons un peu dans la chambre, puis repartons le long de la côte nord, vers l’ouest, jusqu’à Rif, uniquement dans le but d’essayer d’observer des oiseaux et plus particulièrement de photographier un Arlequin Plongeur mâle, ce qui me semble – et je ne saurais dire pourquoi – de plus en plus compromis…

Juste à la sortie de Grundarfjordur, il y a une petite anse… La marée est basse et je remarque la présence d’un groupe d’une vingtaine de Fuligules Milouinans, surtout des mâles, qui se reposent sur l’eau, la tête sous l’aile… Ils sont accompagnés par quelques Fuligules Morillons

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Fuligule Milouinan

Il y a aussi quelques Goélands Bourgmestres et des Huîtriers Pies… Un peu plus loin, les inévitables Eiders à Duvet, pléthoriques dans le secteur et que je retrouverai en très grand nombre partout, sur toute la côte… J’insiste en passant sur la difficulté à photographier des mâles dans de bonnes conditions… Contrairement aux femelles ils forment des bandes nombreuses et ne sont pas ralentis par les poussins, leur vigilance est optimale et leur caractère farouche…

Une dizaine de kilomètres plus loin, dans un secteur peut-être nommé Brimisvellir, la route passe entre la mer à droite et une sorte de lac peu profond à g auche… Là, je vois un mâle de Canard Souchet, le seul du voyage, et un couple de Cygnes Chanteurs, ces derniers étant bien moins abondants dans la région qu’ils ne l’étaient dans le nord-est… Il y a aussi quelques Canards Colverts

Nous repartons avec la voiture et traversons la rivière qui relie le lac à la mer… Chaque fois que je passe près de ce genre d’endroit, je pense au goût des Arlequins Plongeurs pour les cours d’eau… J’ai constaté que les femelles les fréquentaient dans les terres et je me dis, par analogie, que les mâles pourraient bien en fait autant sur les côtes… En passant en voiture, je distingue vaguement un oiseau sur une pierre au milieu du la rivière, mais je passe trop vite pour l'identifier… Je m'arrête la voiture après le pont et je reviens sur mes pas en marchant, l’appareil à la main… Le pressentiment était bon et je découvre un mâle nuptial qui se repose au milieu du courant… Je reste caché et détecte bientôt d’autres des oiseaux sur un groupe de rochers un peu plus loin… Il y a des mâles, des immatures et quelques femelles… D’autres oiseaux se prélassent sur la plage de galets qui forment une berge… Incroyable comme les plumages sont cryptiques dans ce milieu minéral et sombre… Il doit y avoir en tout une douzaine d’oiseaux… Séance photos !... J’exulte, comme chaque fois que mon intuition est confirmée par les faits… Ces mâles d’arlequins commençaient à devenir pénibles !...

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Arlequin Plongeur

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Arlequins Plongeurs

Nous continuons avec le sentiment du devoir accompli !… Nous traversons avant Olafsvik un secteur assez plat, avec des herbes sèches et des cailloux… J’observe ici un Labbe Parasite et quelques Grands Corbeaux… Plus loin, il y a un tout petit plan d’eau sur la gauche… Un couple de Plongeons Catmarins y a élu domicile… Faciles à approcher, peu farouches… J’en profite pour la photo…

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Plongeon Catmarin

Juste avant Olafsvik quelques petites falaises plongent dans la mer… De très nombreux goélands sont installés sur son rebord, plusieurs centaines… Il y a des Goélands Bruns, des Goélands Bourgmestres et des Goélands Marins

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Goéland Bourgmestre

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Goélands Marins (sombres) et Goélands Bourgemestres (clairs)

Nous revenons par la même route… La récolte a été plutôt bonne…

Dimanche 1 juillet

Départ pour l’île de Flatey… Nous allons prendre le ferry à Stykkisholmur, quelques dizaines de kilomètres à l’est de Grundarfjordur… Le port accueille de nombreux goélands, surtout des Goélands Bruns particulièrement confiants… Aussi des Goélands Marins et des Goélands Bourgmestres

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Goéland Brun

La traversée dure 01h30, nous devons passer une bonne partie de la journée dans l’île minuscule située dans la partie nord du Breidafjordur… Pas grand-chose d'autre à signaler sinons de très nombreux Macareux Moines qui s’enfuient devant l’étrave du bateau, ainsi que de beaucoup plus rares Pingouins Torda… Beaucoup de Sternes Arctiques, une ou deux bandes d’Eiders à Duvet en vol et quelques Cormorans Huppés… J’aperçois aussi un Phoque Commun qui pointe son museau hors de l’eau, à côté de récifs éloignés… En arrivant à destination, je note la présence de très nombreux Macareux Moines sur les récifs bas qui précèdent le port…

La navigation a été bien tranquille et nous atteignons l’île… Nous sommes 5 à débarquer !…

Description rapide : tout en longueur, avec une route qui va du débarcadère à l’ouest jusqu’au village à l’est ; une grosse dizaine de maisons, deux ou trois chalutiers, des moutons, des prairies, des tourbières, des falaises et des côtes rocheuses… Les oiseaux sont extrêmement abondants et particulièrement confiants… C’est une sorte de monde parfait où les hommes semblent vivre en parfaite harmonie avec la nature… Tout est propre, net, intact… On se croirait au début d’un film, dans le village des hobbits ou dans celui des nains, juste avant que les nuages accumulés sur l’horizon n’éclatent et que les monstres passent à l’attaque… Il y a un côté irréel et idéal à la fois…

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A l'accostage, depuis le ponton, je note la présence de quelques Phalaropes à Bec Etroit qui nagent dans l’eau calme… Un Bruant des Neiges mâles chante sur une grande antenne et vient parfois se poser dans les rochers du rivage…

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Bruant des Neiges mâle

Nous partons à pied par l’unique route dont j’ai parlé… Traversée de prés et de landes tourbeuses : Pluviers Dorés, Bécassines des Marais en grand nombre, Chevaliers Gambettes omniprésents, Huîtriers Pies… Pas mal de Bergeronnettes Grises et de Pipits Farlouses… Et bien sûr, partout, les Grives Mauvis

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Bécassine des Marais

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Chevalier Gambette

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Huîtrier Pie

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Grive Mauvis

Nous avançons vers l’église qui se tient à l'entrée du village… Seulement quelques maisons en chemin, dressées au milieu des prés… Nous sommes continuellement harcelés par les Chevaliers Gambettes, il y en a partout… Mais ce n’est encore rien… Nous arrivons au bâtiment qui se dresse au milieu des prés, sur une bosse… D’ici je décide de rejoindre le rivage sud de l’île afin de voir quels oiseaux pourraient bien s’y trouver… Les Sternes Arctiques sont très nombreuses dans le coin et nichent dans l’herbe… Le chemin que j’ai choisi doit passer en plein milieu de leur colonie… Elles nous harcèlent d’abord en criant, mais bientôt les choses deviennent plus sérieuses et elles nous attaquent littéralement en piquant le dessus de nos crânes à chaque passage… C'en est trop pour Pascale qui ne veut plus avancer ni reculer, terrorisée comme Tippi Hedren dans « les Oiseaux » de Hitchcock… Je dois l’exfiltrer jusqu’à la route et me vois derechef, comme l’usage de la parole lui revient, accusé de l’avoir délibérément attirée dans ce traquenard… La raison n’a plus voie au chapitre et je ne réplique pas… Nous nous donnons rendez-vous un peu plus loin en zone démilitarisée et je repars affronter les kamikazes… Il faut dire que ce n’est pas particulièrement agréable, je n’ai qu’une capuche en guise de protection et les attaques sont consciencieuses… Ce soir mon crâne glabre arborera une vingtaine de petites plaies que je porterai fièrement pendant une dizaine de jours !...

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Sterne Arctique

Arrivé au rivage, je constate que les rochers dégagés par la marée succèdent directement aux prés… Dans cet environnement, je découvre un Guillemot à Miroir à bien mauvaise lumière et un Cormoran Huppé qui nage tranquillement près de lui…

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Guillemot à Miroir

Sur les pierres il y a des Grands Gravelots

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Grand Gravelot

Quelques Phalaropes à Bec Etroit, bien moins nombreux que ce à quoi je m’attendais… Je manque de marcher sur une cane d’Eider à Duvet qui couve dans une petite dépression de la en pente qui va jusqu’à l’eau… Elle reste totalement immobile malgré ma présence…

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Eider à Duvet femelle

Une famille de Traquets Motteux est installée sur les rochers au bord de l'eau…

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Traquet Motteux

Je retrouve Pascale que je sens maintenant beaucoup plus sereine, mais j’évite pour l'instant d’évoquer les faits antérieurs… Nous partons vers le village… Des maisons de toutes les couleurs, plantées dans l’herbe dans les pelouses et les rochers, au bord de la mer… Dans la rue, il y a des Canards Colverts qui traînent dans les jardins, avec les moutons,  et les membres d’un couple de Phalaropes à Bec Etroit qui pataugent dans une flaque…

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Phalaropes à Bec Etroit

Sur l’antenne d’une maison un Bruant des Neiges chante, pendant que sa femelle cherche de la nourriture au sol… On se dit que la vie, ça devrait être comme ça, partout…

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Bruant des Neiges femelle

Nous poursuivons vers la pointe de l’île, par delà le village, et nous entrons dans un paysage de petites falaises, d’herbes et de roches, nettement plus sauvage et sévère… Il y a toujours les mêmes oiseaux et notamment un autre couple de Bruants des Neiges… Je remarque au pied des escarpements, dans l’eau, de nombreux Macareux Moines qui nagent tout près du rivage…

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Macareux Moines

Très vite, nous tombons sur un panneau interdisant l'accès pendant la période de reproduction des Eiders à Duvet… Demi-tour…

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Eider à Duvet femelle

Nous repartons dans l’autre sens, en longeant cette fois le rivage nord, nettement plus humide, avec des tourbières et des mares… Je remarque ici une femelle de Sarcelle d’hiver, première (et dernière) représentante de cette espèce pour la durée du voyage…

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Sarcelle d'hiver femelle

Aller du port au village ne prend qu’un quart d’heure et nous flânons tranquillement sur l’île, tentant d’en explorer toutes les voies, comme des explorateurs tatillons et minuscules… Inexplicablement, nous ressentons une forme de bien-être qui ne doit tenir en fait qu’à l’adéquation parfaite entre l’environnement et la nature humaine… Je dirais tout simplement que c’est à l’échelle !...

Nous quittons finalement ce havre de paix avec le ferry de l’après-midi qui nous ramène à notre port de départ…

Maintenant, il fait vraiment mauvais… Pluie, vent et grisaille… Repos…

En fin d’après-midi, nous faisons un tout petit tour en voiture jusqu’à Olafsvik… Nous observons un vol d’une dizaine de Chevaliers Gambettes qui se dispersent dans tous les sens, manifestement en proie à la panique… Un Goéland Brun est à l’origine de cet émoi et je le vois capturer un des échassiers en vol, avant de s’éloigner avec sa proie dans le bec… C’est tout pour aujourd’hui…

Lundi 2 juillet 

Toujours gris… Nous espérons qu'une accalmie interviendra qui nous permettrait une longue marche à Arnastapi, le long des falaises côtières… Pour le moment, c’est le minimum syndical et une promenade en voiture… A la sortie de Grundarfjordur, les Fuligules Milouinans et les Fuligules Morillons sont toujours à leur poste… Selon la hauteur de la marée, ils sont plus ou moins proches du rivage… Dans le même secteur, nous abandonnons la voiture pour braver les intempéries et atteindre en marchant la cascade de Kirjufellsfoss… Très beau site, mais la proximité avec la route fait que pas mal de monde a eu la même idée que nous et que nous nous retrouvons vite entourés d’une foule d’au moins douze personnes !...

Ensuite, j’essaie de photographier des Eiders à Duvet mâles, mais bien qu’ils soient très abondants, ils sont extrêmement difficiles à approcher, soit qu’ils soient trop nombreux et prompts à donner l’alarme, soit qu’ils soient dans des lieux inaccessibles… Je ne parviens à rien de satisfaisant…

Nous poursuivons jusqu’à Olafsvik où j’essaie de profiter du rassemblement de goélands sur les petites falaises à l’entrée du bourg pour faire quelques photos de Goélands Bourgmestres et de Goélands Marins… Pas facile, l’abondance des oiseaux, comme toujours, multiplie le nombre des guetteurs et rend l’approche très difficile… Quand je viens trop près, tout le monde s’envole… 

Je vois également un Harle Huppé mâle qui se repose au bord d’un ruisseau mais la lumière est vraiment pourrie et je ne m’attarde pas… Le temps devient de plus en plus pénible et on ne voit plus grand-chose… Nous rentrons un moment pour une petite sieste et au réveil, nous constatons que le soleil pointe timidement le bout de son nez entre les nuages… Direction Arnastapi…

Nous coupons la péninsule par les terres pour nous rendre au sud… En chemin, pas beaucoup de lumière, mais partout l’eau qui ruisselle des montagnes, doucement ou violemment, selon le relief…

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Quand nous arrivons à destination, le temps est bien moyen… Beaucoup de vent et des pluies intermittentes, mais le soleil semble se montrer de plus en plus téméraire… Nous partons courageusement et découvrons le site comme si c'était la première fois… Une vaste étendue d’herbe, peuplées d’oiseaux, qui vient s’interrompre brutalement au-dessus d’une côte rocheuse et escarpée aux formes baroques… Et les montagnes en arrière-plan…

Dans l’herbe : Courlis Corlieu, Bécassines des Marais, Barges à Queue Noire, Grives mauvis, Pluviers Dorés… Tous très territoriaux et donc faciles à observer…

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Barge à Queue Noire

Maintenant, je suis arrivé au bord et nous marchons sur des sentiers agréables sous le pied et parfois vertigineux… La lumière vient de temps en temps donner à l’eau une teinte turquoise aux allures tropicales…

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Les Mouettes tridactyles et les Fulmars Boréaux occupent tous les endroits suffisamment plats pour qu’un œuf y soit déposé… Ils sont grossièrement regroupés par espèce… Beaucoup plus éclectiques, mais moins abondants, les Cormorans Huppés s’installent un peu n’importe où… Et tout ça fait pas mal de bruit et d’odeur de guano !...

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Cormoran Huppé

Tout en bas dans l’eau, je repère un groupe d’Eiders à Duvert, deux Pingouins Torda, un Guillemot à Miroir et un Arlequin Plongeur… Impossible de trouver le moindre alcidé sur les falaises, peut-être cette famille n’y niche-t-elle pas… Un Labbe Parasite survole brièvement les falaises, mais il ne fait que passer…

Et puis, au moment de repartir, après deux bonnes heures de marche, je vois une Mouette atypique qui longe les falaises… Le temps de la détailler un peu et je reconnais une Mouette de Sabine adulte, qui bien que régulière en Islande fait cependant figure de rareté… Elle est déjà loin et je n’ai pas eu le temps de lever mon appareil… J’attends de longues minutes, espérant son retour… En vain, la côte est longue et rien n’indique qu’elle pourrait revenir par ici…

Un dernier regard sur la côte sud et nous repartons vers le nord… 

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Mardi 3 juillet

Nous repartons vers le sud sous une pluie fine et tenace… Nous repartons vers Kidafell où nous allons passer la nuit...

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Hormis pendant quelques dizaines de kilomètres après Grundarfjordur, le paysage est plutôt inintéressant… Ensuite, c'’est un trajet de liaison, rien d’autre, pas mal de route… Une exception ornithologique à cette journée qui sera pauvre en observations : un Labbe Parasite qui chasse au-dessus des rives d’un lac, juste après Grundarfjordur… Je tente quelques clichés... L'espèce est plutôt délicate à photographier à cause de son comportement erratique et imprévisible…

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Labbe parasite

Nous arrivons à Kidafell en début d’après-midi et repartons immédiatement pour le secteur du lac Thingvallavatn, immense étendue d’eau qui nous apparaît timidement sous une lumière incertaine… Les abords sont très vallonnés, parfois escarpés… L’activité hydrothermale est importante, de nombreuses fumerolles témoignent du phénomène…

Du point de vue ornithologique, pas grand-chose à signaler : les oiseaux terrestres habituels et sur l’eau, pas grand-chose… Nous allons pousser jusqu’à Geysir pour voir le site qui a donné son nom à tous les phénomènes similaires de la planète… En route, j’observe un Grand Corbeau

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Grand Corbeau

Arrivé sur place, je note pour la première fois du voyage une affluence nombreuse… Il y a un hôtel, avec un grand parking et des tour-operators qui déversent leurs bus dans les allées… Tout cela va un peu à l’encontre de l’ambiance ressentie jusque là… Mais nous allons quand même sacrifier aux rites grégaires de notre espèce…

Toutes les 4 à 8 mn, le geyser principal crache brutalement son eau chaude et sa vapeur à plusieurs dizaines de mètres de haut… Il y a tout autour un cercle ininterrompu de spectateurs qui attendent l’éructation pour tenter de l’immortaliser… Je dois bien admettre que je fais partie du lot…

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Le site est vaste, on y trouve d’autres geysers, des fumerolles et des marmites de boue… Alors que nous étions encore en voiture, distants de quelques kilomètres, j’ai vu deux geysers – dont le plus grand – cracher en même temps… Je me demande maintenant si la scène n’était pas plus impressionnante – parce que moins policée – de loin…

Nous quittons la « foule » et partons vers un dernier objectif, une dizaine de kilomètres plus à l’est : Gulfoss… C’est une chute, avec une double cataracte… Encore un site grandiose, bien que trop fréquenté à mon goût…

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Question oiseaux, c’est la disette, mais je sais que le meilleur est derrière moi et je ne compte sur rien d’extraordinaire maintenant… Hormis les rapaces, je n’ai pas loupé grand-chose…

Nous revenons vers Kidafell et allons manger près du lac Medalfellsvatn… Je vous conseille ce secteur si vous aimez la nature et les oiseaux, c’est beaucoup plus riche et varié que le Thingvellir… Une mention particulière pour les familles d’Oies Cendrées accompagnées de poussins, sur les rives du lac, et pour quelques petits groupes d’Eiders à Duvet sur les rivières proches du fjord…

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Oies Cendrées

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Eiders à Duvet

Maudite lumière, nous reviendrons demain matin… Toutes les autres espèces habituelles sont présentes dans le secteur, et en grand nombre…

Mercredi 4 juillet

Dernier jour en Islande… Nous prenons l’avion très tôt demain matin…

Nous commençons avec une dernière visite au nord de Kidafell, près du lac Medalfellsvatn… Nous revoyons bien sûr les hôtes habituels des lieux : Cygnes Chanteurs, Oies Cendrées, Bécassines des Marais, Pluviers Dorés, Chevaliers Gambettes et autres… Nous repérons encore quelques Eiders à Duvet peu nombreux, donc abordables, dans le courant d’une rivière…

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Eider à Duvet (mâle en début d'éclipse)

Et puis surtout, last but notre least, nous voyons un Renard Polaire… Je fais quelques photos…

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Renard Polaire

Maintenant, direction Reykjavik où nous allons passer notre dernière nuit…

Nous commençons par un parc, dans la ville même, tout près du centre… Ca s’appelle Ellidaardalur… C’est tout simplement incroyable, on n’entend pas un bruit de voiture !... Une rivière coule au milieu de la végétation, sans qu’on voit émerger une maison ou une construction… Pleine nature !... Nous faisons une longue promenade à pied…

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C’est l’occasion de voir un couple de Cygnes Chanteurs avec ses poussins, pas mal de Mouettes Rieuses et, dans les pins, de nombreux Sizerins Flammés – les premiers du séjour, jamais à bonne lumière…

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Cygnes Chanteurs

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Mouette Rieuse

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Sizerin Flammé

Il y a aussi pas mal de Merles Noirs, souvent chanteurs, représentants d'une espèce jusqu’alors absente de ma liste d’observations… Et bien sûr, comme dans tous les parcs, il y a des Canards Colverts

Nous nous éloignons ensuite de Reykjavik de 1 ou 2 kms et visitons un autre parc, Heidmork, qui s’étend au sud-est de la ville… C’est absolument sauvage : petites formation volcaniques, rochers, tourbières, un lac… La différence avec tous les endroits que nous avons visités jusque là, c’est l’abondance des pins qui constituent même une véritable forêt, environnement fermé dont j’avais perdu l’habitude…

Sur le lac, je vois des Sternes Arctiques en chasse et un couple de Plongeons Imbrins

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Plongeon Imbrin

Ailleurs, c’est les hôtes auxquels je me suis désormais habitué, notamment les Bécassines des Marais très abondantes…

Nous finissons dans Reykjavik… 150 000 habitants, mais on se croirait en France dans une sous-préfecture de 15 000 !... La circulation est fluide, les immeubles de faible hauteur et les gens en nombre raisonnable… Pour ceux qui aiment l’architecture, qu’ils aillent ailleurs… Ici rien n’est beau, rien n’est laid… Aucune folie des grandeurs, aucune pullulation… C’est juste fonctionnel !... Pour une ville, c’est à mon sens ce qui se rapproche le plus de l'habitabilité !...

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Les oiseaux se sont faufilés jusqu’ici… Il y a un étang en plein centre, dans un minuscule parc… Beaucoup de Canards Colverts, mais également quelques Fuligules Morillons et Fuligules Milouinans… Beaucoup de Goélands Bruns aussi…

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Fuligule Milouinan mâle

C’est la fin du voyage… Nous rentrons dormir un peu pour nous réveiller au milieu de la nuit et prendre l’avion au petit matin…

Liste des espèces observées : Plongeon Catmarin - Plongeon Imbrin - Grèbe esclavon - Fulmar Boréal - Cormoran Huppé - Cygne Chanteur - Oie à Bec Court - Oie Cendrée - Canard Siffleur - Canard Chipeau - Sarcelle d'hiver - Canard Colvert - Canard Pilet - Canard Souchet - Fuligule Morillon - Fuligule Milouinan - Eider à Duvet - Arlequin Plongeur - Harelde Boréale - Garrot d'Islande - Harle Huppé - Lagopède Alpin - Huîtrier Pie - Grand Gravelot - Pluvier Doré - Bécasseau Violet - Bécasseau Variable - Bécassine des Marais - Barge à Queue Noire - Courlis Corlieu - Chevalier Gambette - Phalarope à Bec Etroit - Labbe Parasite - Mouette de Sabine - Mouette Rieuse - Goéland Brun - Goéland Bourgmestre - Goéland Marin - Mouette Tridactyle - Sterne Arctique - Guillemot de Troïl - Guillemot de Brünnich - Pingouin Torda - Guillemot à Miroir - Macareux Moine - Hibou des Marais - Pipit Farlouse - Bergeronnette Grise - Troglodyte Mignon - Traquet Motteux - Merle Noir - Grive Mauvis - Grand Corbeau - Etourneau Sansonnet - Sizerin Flammé - Bruant des Neiges

Renard Polaire - Phoque Commun

 

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