Un Américain en Charente (15 septembre 2011)
Un Bécasseau Tacheté est annoncé en Charente... Sur le barrage de Lavaud, limitrophe de la Haute-Vienne... Tout près de chez moi... Pas de problème, il fait beau, j'y vais...
C'est la "rareté américaine" la plus "fréquente" en France... Mais je ne l'ai encore jamais vue... Avant de partir, j'ai repéré sur les guides les pattes jaunes et le motif en pointe formé par les stries sur la poitrine blanche... Je ne le louperai pas s'il est là... Ah, j'oubliais : il se tient souvent très droit, bien campé sur ses pattes assez longues... American pride !...
J'arrive et je trouve immédiatement l'oiseau, sur une petite vasière... Le lac est à moitié vide... Le bécasseau tacheté tient compagnie à un chevalier gambette... Ils sont loin... Je dois contourner le plan d'eau pour les approcher un peu...
Une longue marche dans l'herbe trempée de rosée et je l'ai devant moi... Loin... Le gambette a disparu... Hélas, je vois un autre observateur, la longue-vue à l'épaule, qui avance droit sur lui... Il ne l'a pas vu... D'un bon pas, il fonce... Pas un moment il ne s'arrête pour observer... Ce qui devait arriver arrive : l'oiseau lui part dans les pieds... Il ne le voit toujours pas... Je suis 100 mètres derrière l'observateur qui ne m'a pas vu moi non plus... Je suis le bécasseau dans mes jumelles et le vois se poser sur une large vasière, de l'autre côté de l'eau...
Grand détour en voiture... Et une autre longue marche... Je sais où est ma cible... Je fais un large crochet pour mettre le soleil dans mon dos et aborder la bête dans les meilleures conditions... J'avance courbé dans les herbes et j'atteins le bord de la vasière... Je suis à 50 mètres de l'oiseau... J'installe l'appareil-photo sur son trépied... Je ne lache plus les jumelles... Je distingue toutes ses attitudes, tous ses regards... Quand il se nourrit, je fais deux pas en avant... Je suis à 30 mètres... Quand il observe les alentours, je me fige, vertical... Il semble indifférent... Deux fois, ils se tapit au sol et je crains qu'il ne décolle, mais non, je le vois qui scrute le ciel : ce sont les rapaces qui l'inquiètent, il ne fait aucun cas de moi... Je continue ma progression intermittente à la recherche de la meilleure lumière... 15 mètres... Maintenant, je ne bouge plus... L'appareil est prêt... Je mitraille... L'oiseau parcours son champ de boue et effectue lui-même la deuxième phase de l'approche... Il vient jusqu'à 5 mètres de moi... Je vois sont oeil continuellement et pas une fois il ne se fixe vers moi... Le manège dure 20 minutes au moins... Le bécasseau passe et repasse devant moi, s'éloigne et se rapproche... La lumière est magnifique, les reflets sur la vase étonamment variés et irisés...
Et puis, tout à coup, sans raison apparente, l'oiseau décolle et repart là d'où il était venu... See you later...