Les plaines de Villafafila – Castilla y Leon (22 et 23 mai 2011)
C’est plat… Sans ombre et sans concessions autres que des pigeonniers, éparpillés au hasard, souvent en ruine… Des terres labourées, des champs de céréales et des zones herbeuse… Pas vraiment une steppe au sens strict du terme… Mais pour un animal, c’est pareil…
Le village de Villafafila est au milieu… Des « lagunas » un peu partout, étendues d’eau incongrues mais vitales… Peu profondes, comme d’immenses flaques… Et Otero de Sariegos, hameau fnatôme d’éleveurs de moutons, abandonné, ruines brûlantes au milieu d’une infinité de poussière… Un église s’y élève encore et donne la mesure de la ferveur catholique passée du peuple espagnol : il doit tout juste y avoir une dizaine de maisons…
Froid le matin… Et puis la température s'élève avec le soleil qui monte… Après-Midi torrides…
J’ai passé deux matinées de suite dans le secteur, de 7 à 10h00… Et deux heures de plus, à Otero, en plein après-midi… C’est tout… Pas assez mais déjà énorme…
Les zones herbeuses
Les plaines de Villafafila accueillent la plus grande population d’Outardes Barbues d’Espagne…
Il y en a partout… Le matin, impossible de rater ces énormes oiseaux qui déambulent, seuls ou en groupes, dans la végétation rase… Souvent bien loin des routes… Surtout des mâles m’a-t-il semblé…
Si vous approchez en voiture, au hasard d’une piste, vous avez quelques chances pour une observation rapprochée, mais l’oiseau s’éloigne systématiquement, sans affolement, en marchant tranquillement, tournant régulièrement la tête vers l’intrus… L'approche à pied, c’est quasi impossible : envol garanti à distance plus que respectable…
L’après-midi, la discrétion augmente au point qu’on se demande où sont passés ces géantes, pourtant pléthoriques à l’aube… Et puis un vol passe dans le ciel, signalé par le bruit des ailes frappant l’air immobile… Et la question évidente : d’où viennent-elles ?
Les zones herbeuses accueillent d’autres oiseaux typiques du milieu : Cailles des Blés chanteuses et invisibles, Perdrix Rouges, toujours surprises, Oedicnèmes Criards dans les terres labourées… A l’entrée de Villafafila, j’ai surpris un petit vol d’Outardes Canepetières, unique preuve à mes yeux de la présence de cette espèce dans le secteur…
Cortège d’Alouettes : Alouettes Calandres, Alouettes Calandrelles, Cochevis Huppés, Alouettes des Champs…
Très nombreux Bruants Proyers et Traquets Motteux… Des Linottes Mélodieuses… Un seul Pipit Rousseline, mais je pense qu’il devait y en avoir d’autres !… Baucoup de Huppes Fasciées...
Les Gangas Unibandes resteront dans mon souvenir, par leur discrétion, le pendant inversé de la visibilité des Outardes Barbues … Plusieurs observations cependant… Toujours dans des terres labourées (ailleurs, je pense qu’ils sont invisibles, leur petite taille les dissimulant derrière la végétation éparse)… Inapprochables, farouches, méfiants, toujours en alerte… Paranos !... Effrayés, ces oiseaux s’envolent systématiquement dans la direction du soleil...
Et pourtant, quatre oiseaux repérés dans un labour… J’abandonne la voiture dans un chemin, dissimulé par une étroite zone broussailleuse de faible hauteur… Je rampe jusqu’aux limites de la terre nue… Pari gagné, je suis aussi près de ces satanés oiseaux que j’espérai l’être dans mes rêves les plus optimistes… Hélas, l’appareil est au ras du sol et la mise au point de l’autofocus est perturbée par les quelques brins d’herbe, juste devant moi… De plus les oiseaux sont bruns sur une terre brune… Si je me soulève un tant soit peu, ils s’envolent… J’ai beau tenter plusieurs expériences, rien n’y fait : l’autofocus ne veut rien entendre et, en mode manuel, c’est mon œil qui ne fait pas la mise au point par manque de contraste… Pour enfoncer le clou, les oiseaux se déplacent continuellement, picorant la terre nue… Je me dresse un peu sur mes coudes, après une attente plutôt longue et stérile… Et ce qui devait arriver arrive : envol des deux couples…
Les photos qui illustrent l’article ne proviennent aucunement de ce supplice de Tantale, mais ont été prises depuis la voiture, de beaucoup plus loin… Sale bête !…
J’observe plusieurs Hiboux des Marais dans le secteur, dont un individu particulièrement débonnaire, installé sur un piquet juste en bord de route…
L’occasion de mitrailler…
Les rapaces sont là : Nombreux Busards Cendrés, presque tous en couples cantonnés…
Des individus gris, classiques, et pas mal d'autre de forme sombre, dont un couple homogène…
Les oiseaux sont souvent posés au sol ou patrouillent sur un secteur relativement restreint…
Il en va différemment des Busards Saint-Martin… Je vois plusieurs individus, mâles ou femelles, mais toujours en mouvement… Ils semblent couvrir des territoires beaucoup plus larges que leurs cousins... Ils se dérobent systématiquement à mes velleités photographiques… Où que ce soit et quelle que soit son abondance, cette espèce me pose problème…
Les Busards des Roseaux sont bien présents, glissant au-dessus des champs ou des lagunes…
Partout, des Milans Noirs, très nombreux, particulièrement dans le sillage des tracteurs où ils recherchent les cadavres débités à leur intention par les agriculteurs matinaux…
Plus rares, des Aigles Bottés passent haut dans le ciel… Après tout, peut-être sont-ils plus nombreux, mais j’ai tellement à voir à hauteur d’horizon que je lève en définitive assez peu les yeux…
Lorsqu’on s’éloigne du centre de la zone et qu’on approche des villages, quelques arbres s’élèvent en bosquets ou en haies… Des espèces plus « classiques » se montrent alors : Buses Variables, Hirondelles de Fenêtes, Tourterelles Turques, Pies Bavardes, Serins Cinis et Corneilles Noires… Dès les premières broussailles un peu hautes, les Rossignols Philomèles se font entendre… De tous les côtés… Et dans les villages, les Martinets Noirs sont omniprésents... L'occasion d'en photographier quelques uns nourrissant dans les trous des murailles...
Et subissant parfois quelques embouteillages !...
Les lagunes
Les lagunes sont parfois grandes, souvent minuscules… Tôt le matin, dans l’aube encore incertaine, des Sternes Hansels, bruyantes, arrivent d’on ne sait où – ou partent – survolant les terres… Certaines d’entre elles sont installées sur un petit coin d’eau proche d'une rive, qu’elles survolent en cercle, continuellement : lieu de nidification ou de nourrissage… Je n’ai pu approcher…
Nombreux Canards Colverts, des Canards Chipeaux et des Tadornes de Belon… L’eau peu profonde est arpentée – au sens propre – par des Echasses Blanches, de nombreuses Avocettes Elégantes, quelques Hérons Cendrés, plus proches des rives et par un groupe d’une quinzaine de Spatules Blanches... Ces dernières se tiennent dans les secteurs les plus profonds, pataugeant jusqu’au ventre, la tête le plus souvent immergée…
Sur les étroites vasières, j’ai noté la présence de nombreux Petits Gravelots et de Chevaliers Gambettes… Les Vanneaux Huppés sont très nombreux dans l’herbe et la rare végétation autour des mares…
Otero de Sariegos et les Pigeonniers
Chaque pigeonnier, qu’il soit rénové ou en ruine accueille une théorie de moineaux qui s’installent sous les tuiles rondes pour se reproduire... Les plus nombreux, comme il se doit, sont les Moineaux Domestiques...
Partout, bruyants et dissipés... Mais cependant farouches et fuyards, contrairement à leurs congénères urbains...
Viennent ensuite les Moineaux Friquets...
Localisés sur certains sites, en compagnie de Moineaux Domestiques...
Et enfin, les Moineaux Soulcies… Ils côtoient les deux autres espèces et occupent exactement les mêmes milieux...
Sur la photo suivante, on distingue nettement la tache jaune de la gorge, critère très déterminant pour l'espèce, mais linvisible la plupart du temps sur le terrain...
Je ne crois pas avoir visité un secteur où les moineaux, toutes espèces confondues, étaient aussi nombreux…
Et ça continue dans les ruines d’Otero de Sariegos… Les trois espèces sont là, sur les toits et les fils… Partout !...
Un couple de Cigognes Blanches, comme sur chaque église de Castille, a installé son nid sur le petit clocher : deux poussins et un adulte sont dessus... Ils ne bougent pas sous le soleil écrasant du début d’après-midi… A l’étage plus bas, sous une corniche, une famille de Choucas des Tours… Les Etourneaux Unicolores ont aussi investi le secteur… Il sifflent sur les toits et occupent des trous de murs… Les maisons abandonnées abritent des familles d’Hirondelles Rustiques dont les jeunes, tout juste sortis du nid, s’entraînent au vol dans les pièces fraîches et obscures, s’élançant de poutre en poutre…
Les Faucons Crécerellettes sont tout simplement immanquables…
mâle
Installés sur l’église et dans les vieux bâtiments… J’ai repéré deux nids et observé des adultes, à chaque fois des femelles, qui s'y introduisaient avec de la nourriture dans le bec, la plupart du temps de gros insectes et à une reprise un petit serpent…
femelle
Attention, pour la photo, n’allez pas croire que c’est facile… Ces oiseaux jouent à cache-cache…
mâle
Ils n’aiment pas se laisser observer posés et décollent dès qu’on laisse apparaître l’objectif de l’appareil photo de derrière le coin de mur d’où l’on pensait pouvoir les approcher…
mâle
Une seule technique : s’asseoir à l’ombre, ne pas bouger et tôt ou tard l’un de ces oiseaux viendra se poser pas trop loin…
mâle
Les mâles, même s’ils s’activent de temps en temps aux abords des nids, m’ont semblé moins assidus que les femelles pour le nourrissage, mais je ne suis pas resté assez longtemps pour me faire une idée suffisament précise… C'est juste une impression, peut-être inconsciemment induite par mon propre machisme !...
femelle
Allez à Villafafila, c’est entre Zamora et Burgos, dans la Castilla Y Leon… Pas besoin de rester très longtemps (mais l’on aimerait pourtant) et vous verrez dans d’excellentes conditions des espèces difficiles à observer ailleurs… En plus, le matin il n’y avait que moi et quelques agriculteurs sur leurs tracteurs… Le pied... Quant aux paysages, ils sont ce qu’ils sont… Ne vous attendez pas à être émerveillé, mais il me semble cependant qu’on peut se sentir frappé par ces terres plates et monotones, obstinément ponctuées de pigeonniers dont la multiplication semble confiner à l'absurde…